jeudi 4 avril 2013

Diabete


Parmi les petits tracas médicaux de la grossesse, le diabète gestationnel reste méconnu. Cette forme de diabète se développe pendant la grossesse, généralement durant le 2e trimestre. Parfois, il s'agit d'un diabète préexistant jusqu'alors non diagnostiqué. Bien que rares, les complications pour la mère et l'enfant à naître peuvent être importantes. Aujourd'hui, des médecins appellent à un dépistage systématique de cette maladie.

Le surpoids, facteur de risque majeur

Diabète gestationnelLa grossesse se caractérise par de nombreux changements physiques et physiologiques. Ainsi, la production d'insuline par l'organisme (nécessaire à la dégradation du sucre) peut devenir insuffisante. Durant le 2e trimestre, le placenta commence à sécréter des quantités plus importantes d'hormones susceptibles de provoquer une insulino-résistance (moindre efficacité de l'insuline en charge de la régulation de glucose dans le sang). Conséquences : une hyperglycémie chez la mère et à partir d'un certain seuil, un diabète gestationnel.
Parfois, la grossesse n'est pas à l'origine de cette maladie. Déjà présente lors de la conception, elle n'est diagnostiquée qu'à l'occasion des examens de la grossesse.
Certains facteurs de risques du diabète gestationnel sont bien identifiés : obésité, surpoids, antécédent de diabète personnel ou familial, précédentes complications de la grossesse (malformations, poids de naissance supérieur à 4 kg, enfant mort-né…).

Un traitement simple pour éviter les complications

Le plus souvent, les conséquences de ce diabète sont rarement graves. Ainsi, la mortalité périnatale est très faible. Le principal risque est un poids de naissance trop important (macrosomie). Cela arrive dans 20 à 30 % des cas, contre 10 % pour la population générale. Cette particularité s'accompagne plus facilement de complications périnatales (prééclampsie, accouchement prématuré, recours à la césarienne, etc.). A plus long terme, l'enfant a plus de risque de souffrir de surpoids, d'obésité et de diabète. Pour la mère, le danger est que ce diabète gestationnel se pérennise en un diabète de type 2.
Comment éviter ces complications ? Le premier traitement du diabète gestationnel est simplement nutritionnel, "un simple régime suffit la plupart du temps", note le Pr Laurent Mandelbrot, chirurgien gynécologue obstétricien à l'hôpital Louis Mourier (Colombes). Si cela ne suffit pas à faire descendre la glycémie au-dessous de 0,95 g/L, un traitement à base d'insuline peut être prescrit. Les antidiabétiques oraux ne sont pas recommandés. Le suivi après l'accouchement est primordial : les femmes doivent être revues 6 semaines après l'accouchement avec un contrôle glycémique. Une prise en charge adaptée permet de réduire de moitié le taux de macrosomie chez les nouveau-nés et celui de complications néo-natales3. Mais pour une bonne prise en charge, encore faut-il que les femmes soient dépistées…

Un dépistage aujourd'hui limité aux femmes à risque

Aujourd'hui, le Pr. Laurent Mandelbrot1 rappelle que les femmes présentant un facteur de risque majeur (surpoids, diabète familial, etc.) doivent bénéficier d'un dépistage, dès la première consultation, via une glycémie à jeun. Le but est de pouvoir traiter le plus rapidement possible la patiente pour éviter les complications. Mais pour les autres, la Haute autorité de santé (HAS2estime que l'intérêt d'un dépistage systématique organisé est discutable. Néanmoins, le médecin vérifie le taux de glycémie de deux manières :
  • La glycosurie, test urinaire pratiqué à chaque examen (il permet de vérifier la présence de sucre dans les urines). Mais le Pr. Mandelbrot rappelle que "la glycosurie, bien qu'obligatoire, n'est pas spécifique et présente donc peu d'intérêt quant au dépistage du diabète gestationnel".
  • Un test dit de charge entre la 24e et la 28e semaine d'aménorrhée. Ce test permet d'évaluer la régulation de la glycémie après absorption de glucose. "Par contre, le débat porte actuellement sur le choix du test de dépistage et surtout des seuils permettant de définir un diabète gestationnel" précise le Pr Mandelbrot. En effet, il existe plusieurs tests à même d'étudier la capacité à réguler la glycémie, mais chacun présente des sensibilités et des spécificités différentes : le test d'O'Sullivan, le test de l'OMS et l'HGPO3.

"Oui à un dépistage systématique du diabète gestationnel"

Au-delà du choix du test, d'autres freins au dépistage existent. Ainsi, certains médecins estiment qu'un dépistage systématique pourrait provoquer stress et anxiété chez les femmes enceintes. Mais une étude4 réalisée en 2005 ne permet pas d'accréditer cette thèse. Des chercheurs australiens ont étudié chez 1 000 femmes le niveau d'anxiété et les troubles provoqués par un dépistage et si besoin un traitement associé, en comparaison avec des femmes recevant des soins de routine. Outre la réduction des complications dans le groupe traité, il apparaît que les femmes du groupe dépisté ont mieux vécu leur grossesse et elles sont deux moins nombreuses à souffrir de dépression postnatale.
Pour le Pr. Mandelbrot, les réserves quant à la systématisation d'un tel dépistage et la nécessité d'un suivi du diabète après la grossesse n'ont plus lieu d'être : "Il faut bien comprendre que l'objectif est de prendre en charge de la manière la plus efficiente possible les femmes touchées, et ce, sans excès de stress bien entendu. Nous ne cherchons pas à sur-médicaliser la grossesse, mais à limiter les éventuels risques".

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